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La Libye, l'autre terrain de l'affrontement séculaire entre l'Europe et la Turquie

ob_359f88_6d89525f-d37c-4232-97c3-a8ea1c79e273.jpegLa Turquie est une ennemie de l’Europe. Cela fait près de six siècles que cela dure. Aujourd’hui encore, les troupes d’Ankara occupent la Thrace orientale, la partie européenne de Constantinople ainsi que le nord de Chypre. Ses avions et ses navires violent quotidiennement l’espace aérien et maritime de la Grèce et de Chypre. Mais comme si cela ne suffisait pas, le président turc en signant à l'automne 2019 un accord avec le Gouvernement d’union nationale de Libye (GAN), convoite ouvertement les richesses gazières au large des côtes grecques et chypriotes. Cet accord instaure arbitrairement une frontière maritime entre Ankara et Tripoli permettant à la Turquie de revendiquer officiellement des droits sur certaines zones dont les fonds marins sont riches en hydrocarbures au détriment de Chypre et de la Crète. Comme l'a parfaitement souligné Antoine de Lacoste si "cet accord n’a aucune valeur juridique (...) il permet à la Marine turque de se promener dans toute la Méditerranée en prétendant être chez elle et en agressant régulièrement les compagnies pétrolières ou gazières, notamment autour de Chypre". (*)

Athènes a réagi en renvoyant l’ambassadeur de Libye en Grèce et en dénonçant « une violation du droit maritime international ignorant la présence d’îles grecques dans cette zone ». Mais ces ambitions nés-ottomanes en Méditerranée orientale déplaisent également à la Russie pour qui cette région est historiquement une zone stratégique. Déjà rivaux en Syrie, les deux puissances vont se retrouver face à face en Libye. De nombreux éditorialistes européens dénoncent un hypothétique partage de la Libye entre Ankara et Moscou au détriment des intérêts européens. Ce raisonnement est absurde. Cette persistance à voir la Russie comme une rivale de l’Union européenne, relayée dans nos médias par tous les lobbyistes atlantistes, est contraire aux intérêts de l’imperium Europa. Tout comme nous, la Russie n’a jamais accepté la perte des territoires européens sous occupation turque. La maîtrise de la Méditerranée orientale est indispensable pour reconquérir ces territoires et contenir la puissance turque. En Libye, l’Europe doit suivre l’exemple de la Russie et se ranger derrière les troupes du maréchal Haftar selon l’adage « les ennemis de mes ennemis sont mes amis ». La France doit montrer l’exemple en sortant de sa neutralité. 

D’autant plus que les rivalités entre les États européens en Libye sont désormais caduques. L’argument de l’Italie pour soutenir le GAN de Tripoli était avant tout d’ordre migratoire. Rome affirmait, non sans raison, que les accords passés avec le gouvernement libyen avait permis de stabiliser les départs vers la péninsule et que rien ne garantissait qu’une victoire des forces du maréchal Haftar permettrait la pérennisation de ces accords. Mais cet argument ne tient plus avec l’entrée en jeu de la Turquie auprès du GAN. On ne voit pas très bien ce qui empêcherait Recep Tayyip Erdogan, maître de la Libye, de pratiquer le même chantage migratoire envers l’UE qu’il exerce déjà depuis son pays. En régnant à Tripoli, le sultan d’Ankara contrôlerait ainsi les deux voies principales de l’immigration à destination du continent européen. Est-ce que les Européens veulent vraiment vivre un tel cauchemar ? En toute logique l’intelligence voudrait que les nations européennes fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour transformer l’intervention militaire turque en Libye en défaite stratégique majeure. Cela passe par la fin des divisions européennes et par un rapprochement avec la Russie. Car n’en déplaise au « russophobes » et autres « poutinophobes » l’imperium Europa que nous appelons de nos vœux ne pourra pas se faire sans Moscou.

D.B.

(*) Source in https://www.bvoltaire.fr/la-turquie-ou-le-reve-dun-nouvel-empire-ottoman/

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